Oxydation Thermique Des Gaz
Par Hatem Saadoui
Le traitement thermique des sols contaminés par des composés volatils et semi-volatils génère indubitablement des vapeurs, des gaz et des liquides (condensat). Une fois récupérés à la surface, ces produits nécessitent un traitement ad hoc. L’oxydation thermique dans un dispositif adapté est l’une des méthodes utilisées par Haemers Technologies pour la destruction de substances dangereuses présentes dans ces effluents.
Les conditions opératoires d’une oxydation thermique varient en fonction de la nature de la substance dangereuse :
- Pour les hydrocarbures, la température du gaz émis par la combustion doit atteindre 850°C pendant au moins 2 secondes après la dernière injection d’air ;
- Pour les substances organiques halogénées, les gaz doivent atteindre 1100°C pendant au moins deux secondes.
En fonction de la nature du contaminant, quels sont les différents produits d’une oxydation thermique ?
Les polluants gazeux toxiques, émis lors de la combustion à moyenne (850°C) ou haute température (>1100°C) des gaz, vapeurs provenant d’un sol contaminé et selon la nature du contaminant présent initialement dans le sol, sont nombreux (HCl, HF, SO2, NOx, métaux lourds gazeux, dioxine et furanes, composés organiques volatils (COV), composés bromés et iodés).
Le chlorure d’hydrogène (HCl), ou gaz chlorhydrique, est formé du fait de la présence de chlore dans le sol sous forme de composés organochlorés, de solvants chlorés, de produits phytosanitaires, etc… Le chlore apparaît également du fait de la décomposition de NaCl si ce dernier est présent initialement dans le sol (par exemple, sols de bord de mer). Le PVC (bouteilles, films) contient par exemple 59% en masse de chlore.
Du fluorure d’hydrogène ou gaz fluorhydrique HF est susceptible de se former dans le foyer de combustion. Du fluor et des fluorures sont, en effet, présents dans les résidus de pesticides et dans les déchets comme les tissus synthétiques.
Des oxydes de soufre, dioxyde de soufre SO2 et trioxyde de soufre SO3, sont présents dans les fumées de combustion. Ils proviennent du contenu en soufre du polluant à traiter, soit sous forme organique soit sous forme de sulfate ou du soufre présent initialement dans le sol. Lors de la combustion, le SO2 est produit en quantité plus importante que le SO3 (90% contre 10%).
S + O2 → SO2
SO2 + ½ O2 → SO3
La concentration en SO3 augmente avec l’excès d’air, et diminue avec la température. Au-delà de 950°C, la formation de SO3 devient négligeable. Lors des différents projets de désorption thermique ISTD ou ESTD réalisés entre 2006 et 2018, la gamme des concentrations émises en SO2 dans les gaz de combustion est comprise entre 0 et 50 mg/Nm³.
Des oxydes d’azote sont également présents dans les fumées de combustion. Ces oxydes d’azote NOx sont une famille de composés formés lors des processus d’oxydation à moyenne ou haute température (NO, NO2, N2O, …). Le composé majoritaire est le monoxyde d’azote NO. Celui-ci est formé par trois mécanismes : NO thermique, par oxydation de l’azote de l’air, NO « combustible » par oxydation des composés organiques azotés si présents initialement dans le sol sous l’effet d’une espèce radicalaire contenant de l’oxygène (O, OH), et, NO « précoce » par oxydation de l’azote de l’air dans le front de flamme riche, en présence de radicaux libres carbonés CX. Le dioxyde d’azote NO2 résulte de la réoxydation du NO au cours de sa phase de dilution dans l’air (>600°C). Le protoxyde d’azote N2O apparaît dans les processus de combustion en phase gazeuse dans la zone d’oxydation des flammes. La raison de la très faible quantité formée provient de la recombinaison avec des radicaux H dans les flammes qui les réduisent en N2. Lors des différents projets de désorption thermique réalisés, la gamme des concentrations émises en NOx est comprise entre 1 et 150 mg/Nm³.
Les métaux lourds, émis lors de l’oxydation thermique, représentent une famille de polluants (As, Cd, Hg, Ni, Pb, …) initialement présents dans les sols et volatilisés à haute température. Ils subissent une série de réactions d’oxydation et autres réactions avec HCl et SOx pour former des halogènes (chlorures, bromures, fluorures, iodures) du métal considéré, des oxydes métalliques, des sulfates et sulfures métalliques, des dérivés organiques. Ces composés volatils peuvent se retrouver tels quels dans les fumées, se décomposer sous l’action de la chaleur ou se fixer à la surface des particules et cendres volantes. Des réactions de réduction, par le carbone imbrûlé ou le monoxyde de carbone, peuvent également donner naissance à des émissions de métal élémentaire. Les concentrations totales en métaux lourds émises dans les fumées sont directement liées aux concentrations initiales des métaux lourds présents initialement dans le sol. Par exemple, pour un sol contenant une concentration moyenne en mercure de 12 mg/kg, la concentration maximale obtenue à la cheminée ne dépasse pas les 150 µg/Nm³.
Les dioxines (PCDD ; 75 congénères) et furanes (PCDF ; 135 congénères) peuvent être émis sous forme de traces lors de la combustion des vapeurs. Il s’agit d’un ensemble de composés organiques polycycliques halogénés gazeux, de la famille des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), dont certains sont particulièrement toxiques. Ces composés se forment au cours de l’oxydation thermique (dans les cas où il y a des zones « froides » dans la chambre de combustion), à partir de précurseurs que sont les polychlorophénols, polychlorobiphényles (PCB) et de façon générale, à partir de composés chlorés et aromatiques. Ils peuvent également se former par synthèse lors du refroidissement des fumées (« synthèse de NoVo ») en aval de la chambre de combustion (300 à 400°C).
Enfin les composés organiques volatils (COV) peuvent être émis en cas de combustion incomplète des vapeurs. Par COV, on entend une famille de composés regroupant les hydrocarbures évaporés et les solvants. Il s’agit également de diverses molécules organiques qui n’auraient pas été totalement décomposées au cours de la combustion (hydrocarbures oléfiniques, aldéhydes, les homologues ou supérieurs du benzène, les solvants chlorés, les amines, les cétones …). La concentration en COV émis dépend étroitement des conditions de température et temps de séjour, et de l’homogénéité (turbulence) dans la chambre de combustion.
Des composés gazeux bromés et iodés peuvent également apparaître (HBr, HI) lors de la combustion des vapeurs contenant du brome (industrie des colorants, industrie photographique, phytosanitaire…), ou de l’iode (industrie pharmaceutique, colorants, désinfectant, photographie …).
A côté de ces émissions gazeuses toxiques, on observe également des émissions particulaires, provenant de la chambre de combustion. Ces poussières consistent en particules solides entraînées par les vapeurs/gaz provenant du sol ou/et sont constituées aussi bien des cendres volantes inertes que d’imbrûlés particulaires. Ces poussières sont fines (< 20µm) et de composition très variable. De plus, des espèces en phase gazeuse (métaux lourds) peuvent se condenser ou s’adsorber sur ces poussières, ce qui peut leur conférer des propriétés chimiques et catalytiques (synthèse de Novo des dioxines), en même temps qu’accroître leur toxicité.